Ses facettes insoupçonnées

Book Cover: Ses facettes insoupçonnées
Part of the French Translations series:
Editions:Digital: $ 5.99
ISBN: 978-1-64405-506-9
Pages: 50,857

Ouvert et sans inhibitions, Ian McVeigh vit sans attaches depuis des années, alors il ne peut s’imaginer le désir inattendu et la possessivité qui s’emparent de lui en voyant pour la première fois David, un joueur de rugby sans emploi, ainsi que le nouveau jouet délicieux de son patron. David Kelly est un escroc et bien trop beau pour remarquer Ian, un homme avec trop peu de moyens pour le charmer.

Mais un jour, David ne fait pas que le regarder, il le caresse, flirte et fait tout pour inviter Ian à prendre la place de son sugar daddy. Mais sera-t-il capable de se libérer des murs qu’il a bâtis autour de lui ? Ian ne connaît pas beaucoup le passé de David et ce qu’il ignore pourrait les blesser tous les deux.

Ian dit que le passé de David importe peu, mais quand il le voit avec un autre homme d’âge mûr, il saute tout de suite aux conclusions. Les deux hommes devront affronter la vérité ou risquer de se perdre pour de bon.

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Publisher: Dreamspinner Press
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I

LES BOUTEILLES résonnaient légèrement pendant que je les réarrangeais pour la quarantième fois. Je n’y arrivais pas et je ne comprenais pas pourquoi. D’habitude, je n’avais pas ce genre de problèmes, mais aujourd’hui je ne réussissais pas à me concentrer. Ma vision semblait me faire défaut : le liquide dans les contenants ne ressemblait plus du tout à de l’alcool sous les projecteurs du plateau de tournage et toutes les coupes semblaient tâchées même si je les avais lavées à la main à deux reprises déjà.

— Vous devez bouger la plus grosse bouteille au fond.

Le roulement grave de cette voix me frappa de plein fouet, me faisant frissonner, certains de mes muscles se contractant. Les poils sur ma nuque se redressèrent et je me tournai.

— Vous êtes un expert pour monter les décors maintenant, David ?

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L’homme qui m’avait adressé la parole me sourit et je pus à peine contenir un gémissement en le voyant rentrer ses mains dans les poches de son très court short en jean. Son accent irlandais était différent de tous ceux du coin et caressait ma peau comme un amant le ferait. Il me rendait fou.

Je me penchai afin de pouvoir poser mes fesses sur le comptoir bancal que j’essayais de faire sortir tout droit d’un bar irlandais des années cinquante. Au moins, positionné ainsi, je pouvais dissimuler la bosse dans mon pantalon.

— Je suis seulement un parasite qui se cherche quelque chose à faire, répondit David. Besoin d’aide ?

— Vous êtes libre de faire ce que vous voulez.

Il acquiesça et monta sur le plateau, ce qui permit à son petit short de remonter sur ses cuisses musclées, révélant un bleu sur sa peau délicate. Certainement un souvenir d’un de ses matchs de rugby. Les franges du denim coupé se confondaient avec sa pilosité foncée.

Je ravalai un autre gémissement devant ce spectacle.

— On est toujours libre de faire ce qu’on veut, me dit-il en arrangeant les bouteilles.

Il dut monter sur la pointe des pieds pour y arriver, puisqu’il mesurait une bonne tête de moins que moi. Le bar factice était minuscule, il se colla donc légèrement contre moi tout en bloquant la sortie avec son corps musclé tout en finesse comme celui d’un nageur.

— Tout est toujours en retard par ici, continua-t-il. Et Ricky est toujours en train de paniquer pour quelque chose. Et quand il panique, mon cul se prend une raclée plus importante que nécessaire, vous comprenez ?

— Ah oui, Ricky.

Ricky était le directeur du plateau, un boulot beaucoup trop stressant pour une personne nerveuse comme lui, si vous vouliez mon avis. Mais j’étais un simple concepteur de décor et peu de choses dépendaient de mon opinion. Cependant, le rappel que cet homme sexy et charmeur baisait mon patron – ou plutôt, connaissant les habitudes de Richard Cornwall, se faisait baiser par lui – s’occupa de mon érection assez vite.

— Est-ce qu’il vous envoie me surveiller ?

Cela ne m’aurait pas trop étonné de la part de cette petite fouine de demander à son garçon du moment d’espionner le plateau. Richard n’était pas un très bon patron et je ne comprenais pas pourquoi David s’abaissait à son niveau.

— Non, il m’a envoyé chercher un truc, me dit David en haussant légèrement les épaules, dévoilant un autre pan de peau lui aussi recouvert d’une ecchymose.

Je ressentis l’étrange besoin de me pencher vers lui pour caresser la marque, comme pour soulager sa douleur.

— Et j’imagine, poursuivit David en fronçant les sourcils, pour se débarrasser de moi en même temps.

Il se replaça confortablement sur ses pieds et se tourna vers moi. La moue qui étirait ses lèvres me donnait envie d’écraser ma bouche contre la sienne. Je sentais contre ma peau la chaleur de son corps et je réussissais même à percevoir les effluves de sexe, de sciures de bois et de peinture qui émanaient de lui. Le parfum d’un autre homme sur sa peau n’aurait pas dû m’allumer ainsi, mais mon corps avait trop envie du sien pour s’en soucier. Ne pouvant plus retenir ma respiration sous peine de m’évanouir, je dus planifier ma sortie :

— Excusez-moi, lui dis-je en me faufilant derrière lui sans pouvoir m’empêcher de le frôler.

La bosse dans mon pantalon, qui était plus que jamais de retour, avait certainement fini de le convaincre que j’étais complètement obsédé. Je sautai hors du plateau sans me retourner, même en entendant son petit rire.

Je me dirigeai prestement vers le bureau de Richard. Peut-être que si je savais ce que David devait retrouver pour lui, je pourrais l’aider à le chercher. Une petite voix intérieure me disait que je pouvais ainsi m’éloigner de lui et arrêter de mettre à l’épreuve ma maigre capacité à résister à la tentation. Mais une autre me susurrait en même temps que je pourrais me coller contre lui pour le bien de notre recherche. D’habitude, j’essayais de ne pas penser seulement avec ma queue, mais je n’étais pas non plus souvent confronté à un homme avec un corps aussi sexy que celui de David qui cherchait une simple excuse pour rendre jaloux son amant irritable du moment. Je ne me faisais pas d’illusions, je savais bien qu’il ne me voulait pas pour ma personne. Il voulait simplement un homme gay célibataire et j’étais le premier sur sa route.

Je cognai à la porte de Richard.

— Hé.

— L’as-tu trouvé ? demanda Richard sans se retourner.

Il fouillait son bureau frénétiquement à la recherche de quelque chose.

— Non, lui répondis-je en croisant mes bras sur ma poitrine.

— Va vérifier dans la loge. Nous l’avons utilisé là une fois et tu avais dit que tu allais le laver avant de le ramener. Je te jure, David, si quelqu’un d’autre le trouve, tu feras mieux de fermer ta petite bouche de suceur.

Je grognai pour essayer de contenir mon avis sur ce commentaire désobligeant. Ce salaud n’avait aucune idée du joyau qui lui appartenait.

—Je sais, je sais, ce n’est qu’un godemichet. Mais ce jouet pourrait me faire virer si quelqu’un savait ce que nous faisions ici. En plus, les petits trèfles dessus sont gênants. Je ne comprends vraiment pas pourquoi tu voulais jouer avec quelque chose d’aussi ringard.

Il fouillait maintenant dans le banc de rangement en dessous de la fenêtre et y était à moitié enfoui. Je n’avais aucune envie de découvrir quels autres accessoires pouvaient s’y cacher et je ne voulais pas non plus succomber à la tentation de le pousser pour qu’il y rentre au complet. Son mépris pour l’homme avec qui il était prétendument en couple me dégoûtait.

Je me retournai pour partir sans lui adresser un mot. C’est à ce moment que je l’aperçus, juste là où tout le monde pouvait le voir, sur la bibliothèque derrière la porte. Un long gode en caoutchouc flexible, recouvert de paillettes vertes et de trèfles. Incroyable. Je le mis dans ma poche et m’en allai.

Je fis un petit détour par la salle de repos pour le déposer dans mon sac où il ne ferait de mal à personne. Je retournai là où j’étais supposé être depuis le début, en relatif contrôle de ma colère qui avait surgi devant le manque complet d’empathie dont Richard faisait preuve pour son amant. Ce que je ressentais n’avait aucun lien avec la petite pensée qui me titillait – que jamais je n’aurais traité David de la sorte. Pas du tout.

David était encore sur le plateau à placer le contenant des différentes boîtes sur le bar et sur les étagères l’entourant. Des sous-verres en carton et des shakers argentés garnissaient maintenant la scène, je le rejoignis donc pour continuer le travail en glissant des verres à vin que David venait de terminer de nettoyer une dernière fois dans les crochets au-dessus de nos têtes.

— Les coupes étaient encore un peu tachées, je crois.

Je laissai échapper un petit rire, content de ne pas l’avoir imaginé.

— Vous savez que vous n’avez pas besoin de m’aider, lui dis-je.

— Je sais, me répondit-il en souriant et en laissant entrevoir ses dents parfaites. Mais c’est beaucoup plus drôle de laisser Ricky croire que je fais ce qu’il veut, que de le faire réellement.

— Est-ce que vous l’appréciez au moins ?

— Le rugby est un jeu intéressant, mais qui ne dure pas longtemps, rétorqua-t-il en haussant les épaules.

— Et il vous donne des bleus à n’en plus finir aussi, marmonnai-je en effleurant du bout des doigts une autre ecchymose sur son avant-bras.

Il me lança un clin d’œil avant d’ajouter :

— Oh, pour ça, oui !

Son ton laissait clairement entendre que le rugby n’était pas le seul responsable de ses blessures.

— Ça ne paie pas beaucoup, cependant.

— Et « Ricky », lui, il paie bien ?

— Indirectement, oui, dit-il en posant le dernier verre sur le bar. Ça vous dérange ? Savoir que je le laisse s’amuser avec mon corps et m’inviter au restaurant ?

— C’est avec vous qu’il s’amuse, pas avec moi, lui répondis-je en essayant de rester poli.

Cette question me hantait depuis des mois maintenant. Depuis la première fois que je l’avais vu se faufiler hors du bureau de Richard un soir alors que tout le monde était parti, en fait. J’apportais les touches finales au décor d’un des appartements quand je l’avais aperçu partir en vitesse du bureau jusqu’aux toilettes des hommes, son pantalon à la main, avec l’air d’un homme qui avait été bien utilisé.

Mais il avait le sourire aux lèvres à ce moment-là, et les plaisanteries qu’il avait lancées par-dessus son épaule m’avaient donné l’espoir qu’il était peut-être capable d’adoucir quelqu’un comme Richard.

Nous avions tous les deux été bien naïfs de croire qu’il en était capable. Je commençais à voir à quel point David souffrait de la présence de son amant.

David finit par hocher la tête pour me signifier que c’était le cas, que c’était bien lui qui batifolait avec Richard et personne d’autre. Il se remit au travail, plaçant des assiettes et des tasses avec goût pour leur donner l’air d’appartenir à un vrai pub. Je ne pouvais qu’admirer son œil pour les détails. Et son derrière. Ce qui m’amena à me demander pourquoi je n’étais pas plus fâché qu’il l’utilise pour payer son loyer. Peut-être parce qu’il n’en avait pas honte. Il n’essayait pas d’être quelqu’un d’autre que lui-même et cette attitude était très sexy, beaucoup plus que sa manière de gagner de l’argent, disons.

— Je sais que vous devez penser que…

— Merde, l’interrompis-je.

— Quoi  ? demanda David en fronçant les sourcils.

Je pointai du doigt l’autre bout de la pièce où Richard venait d’émerger de son bureau.

— C’est Richard. Son visage est de la mauvaise couleur. Rouge. Ça ne va vraiment pas bien à son teint.

— Il est en colère, c’est certain, commenta David en le regardant traverser la pièce en grandes enjambées.

— Vous savez pourquoi ?

J’imaginai qu’il allait suggérer la disparition de son jouet sexuel, mais il pivota plutôt vers moi en haussant nonchalamment les épaules.

— Parce que je parle à un autre homme ?

— Vous n’en êtes pas certain ? Parce que vous ne savez pas s’il trouve ça si important que vous me parliez ou parce que vous ignorez s’il s’en fait pour vous tout court ?

Une grimace transforma ses traits pendant une seconde, puis il attacha un faux sourire à ses lèvres en se retournant vers moi. Ses yeux ne montraient aucune émotion. Ils ne faisaient que suivre la progression de Richard dans la pièce, comme si David souhaitait qu’il le remarque. Je le regardai tirer sur son haut bleu d’une telle façon que ses abdos y étaient parfaitement dessinés, sans arriver à savoir s’il voulait vraiment que son amant lève les yeux sur lui.

Le regarder ainsi était douloureux. Il voulait que la colère de son amant soit à propos de lui. Il était pourtant évident que ce n’était pas le cas, ce qui me fit ajouter une raison à la liste grandissante de pourquoi Richard ne le méritait pas.

— Bon, que faisons-nous maintenant ? demanda David en s’arrachant à sa piteuse distraction.

Apparemment, nous allions ignorer Richard autant que possible.

— Tenez, lui dis-je en lui tendant une plaque gravée d’un farfadet et de sa marmite pleine d’or. Nous allons l’accrocher juste là, sur le poteau au-dessus de votre tête. Mais vous vous apprêtiez à dire quelque chose ?

Il grimpa sur le comptoir branlant et baissa la tête vers moi.

— Ce n’est pas vraiment stable, dites-moi.

Je tendis les bras pour le tenir par la taille et il me sourit.

— Beaucoup mieux, merci Ian.

— Juste là sur ce poteau. Il y a déjà un clou, je crois.

— En effet.

Il prit son temps pour accrocher la décoration, tellement qu’il ne restait plus grand-chose de ma lèvre à force de la mordiller pour me concentrer à garder ma main là où elle devait être, sur sa hanche, et nulle part ailleurs.

— Il n’est pas à moi, marmonnai-je à la bosse qui déformait maintenant mon pantalon. On ne le touche pas, alors contrôle-toi un peu.

— Qu’est-ce que vous dites  ?

Il se pencha et posa ses mains sur mes épaules pour s’aider à descendre. Pendant un instant, j’eus à la fois la meilleure et la pire vue de ma vie. Son short très court mettait en valeur son entrejambe et me permettait en même temps d’admirer ses longues jambes. C’était terrible parce que, sous peu, seulement regarder ne serait plus suffisant et je n’avais aucun droit de le toucher. Il était pris par quelqu’un d’autre.

— Est-ce que j’ai dit quelque chose pour vous énerver ?

Il se rapprocha encore plus de mon corps avant de se donner un élan pour atterrir sur le sol. En un instant, il se tenait devant moi, les mains encore sur mes épaules et son souffle caressant mon visage. Un parfum de sexe et de sueur nous entourait.

— Non, pas du tout, réussis-je à répondre d’une voix rauque qui le fit sourire.

Il se moquait de moi ! Son sourire paresseux en coin me narguait en même temps que ses hanches s’inclinaient vers moi.

— Mais alors, qu’est-ce que vous ne devez pas toucher ? C’est ce que je me demande.

Oh, merde.

COLLAPSE
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